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19 novembre 2025

Projet MiLiAr – à la recherche des granites et pegmatites riches en lithium

Le projet MiLiAr (potentiel économique des Micas Lithinifères d’Ariège) débute actuellement de quoi s’agit-il exactement ?

Oscar Laurent

[Oscar LAURENT*] Le projet MiLiAr s’intéresse aux granites et pegmatites à métaux rares. Ces roches représentent des magmas solidifiés en profondeur dans la croûte terrestre, dont la composition particulière a permis d’y cristalliser des minéraux inhabituellement riches en éléments rares, notamment des micas lithinifères. Dans le contexte de la transition écologique, ces roches deviennent des gisements potentiels stratégiques de lithium car ils pourraient permettre de sécuriser un approvisionnement domestique durable. Dans le cadre de MiLiAr, nous souhaitons répondre à une question scientifique encore très débattue, qui a des implications pour l’évaluation du potentiel des gisements connus et pour en découvrir de nouveaux : quelles conditions géologiques particulières faut-il réunir pour former des magmas contenant des micas riches en lithium ? Le contexte ariégeois offre un cadre d’étude idéal pour répondre à cette question : de nombreux indices à lithium y ont été identifiés par le BRGM, sont portés par une grande diversité de granites et pegmatites, et le remaniement tectonique pyrénéen a permis en quelque sorte de « fossiliser » l’environnement géologique qui leur a donné naissance.

Ces micas de pegmatites sont-ils fréquents au sein des formations géologiques ou s’agit-il d’une particularité ariégeoise ? ont-ils été déjà très étudiés ?

Filon de pegmatite intrusive dans les gneiss du dôme de l’Aston, haute vallée de Soulcem (Ariège) © Oscar Laurent

[Oscar LAURENT] Les micas sont parmi les minéraux les plus communs de la croûte terrestre, en Ariège comme partout ailleurs ! Si l’immense majorité d’entre eux contient peu de lithium (quelques centaines de grammes par tonne), la particularité des micas des pegmatites et granites à métaux rares est qu’ils peuvent en contenir cent fois plus, soit des dizaines de kilogrammes par tonne. L’environnement géologique des micas des pegmatites ariégeoises laisse supposer qu’ils appartiennent à cette catégorie, mais cela reste à confirmer car ils n’ont fait l’objet d’aucune étude systématique. L’identification de teneurs élevées en lithium dans certaines localités ariégeoises résulte des campagnes cartographiques du BRGM, menées il y a plusieurs décennies. Il est donc important de mettre à jour ces données anciennes et de les reconsidérer à la lumière de l’avancée des concepts métallogéniques. De plus, des études récentes montrent que les propriétés physico-chimiques et l’environnement minéralogique des micas influencent directement le traitement du minerai. Notre travail de caractérisation de ces micas aura donc un impact non seulement sur notre compréhension de l’origine des granites et pegmatites à métaux rares, mais aussi sur le développement de procédés de libération énergétiquement efficaces pour optimiser l’exploitation future de ce type de gisement.

Sur MiLiAR vous allez travailler avec le BRGM (Jérémie Melleton) comment allez-vous mener ce projet ensemble ?

Détail de cristaux de mica blanc dans une pegmatite © Michel de Saint-Blanquat

[Oscar LAURENT] Avec mes collègues Marieke van Lichtervelde et Loïs Monnier (qui travaillera en tant que post-doctorant financé par MiLiAr), nous sommes engagés depuis plusieurs années dans des collaborations avec le BRGM et d’autres partenaires académiques sur la thématique des pegmatites et granites à métaux rares, avec Jérémie Melleton comme interlocuteur privilégié. Il est par exemple coordinateur du programme de recherche TRANSFAIR financé par l’ANR pour la période 2021-2025 et dans le cadre duquel nous avons travaillé ensemble sur la cible géologique du projet EMILI porté par le groupe Imerys à Echassières (Allier), dans le Massif Central. Le projet MiLiAr s’inscrit donc naturellement dans ce cadre de collaboration existante, permettra d’en renforcer les liens et d’élargir le tissu collaboratif sur la question du lithium « roches dures » en France, en y impliquant l’institut Carnot ISIFoR. Le déroulement du projet bénéficiera de l’expertise du BRGM sur la vision intégrée des spécificités des gisements de lithium à l’échelle européenne et des conditions socio-environnementales de la contribution des territoires à leur possible exploitation future.

 

* Chargé de recherche au CNRS GET